e-business

La dernière conférence organisée par Euroforum les 21 et 22 mars 2001, donna l'occasion à de grands constructeurs et équipementiers européens de livrer leurs dernières réflexions sur le e-business et son impact sur la relation équipementiers/constructeurs. Ces deux journées permirent notamment de faire le point sur les derniers avancements de la stratégie e-business de Renault et de PSA, ainsi que de définir la mission du puissant consortium Covisint.

La place de marché permet de maximiser l'apport du e-business dans la chaîne de valeur automobile

 

La place de marché B to B est certes en train de jouer un rôle important dans le e-business. Des multitudes de places de marché se sont crées depuis 2 ans. On en comptait 2000 en l'an 2000, on en comptera 5000 en 2002, mais peu d'entre elles subsisteront sur le marché. D'après les prévisions des analystes, il n'en resterait plus que 500 en 2003, la majorité d'entre elles ayant été avalées par des plus grands hubs, victimes d'une inévitable concentration et consolidation des acteurs.

 


Dans l'industrie automobile, les places de marché permettent de maximiser l'apport du e-business dans la chaîne de valeur de l'industrie. Les constructeurs et équipementiers de rang 1 ont tout de suite pris position et mis un pied dans la nouvelle économie. Pas un qui ne soit pas aujourd'hui partie prenante dans une place de marché verticale. La plupart des grands acteurs du secteur ont en effet choisi de construire leur place de marché en interne ou de participer à des consortiums. Même s'ils se défendent de toute entente (au sens Communautaire du terme), certains constructeurs ont choisi de s'allier avec leurs concurrents aboutissant ainsi à un concept nouveau : celui de " coopetition ". Ils restent concurrents mais mettent des moyens en commun pour rationaliser certaines procédures d'achat, de supply chain, ou de développement de produits (plateaux virtuels).

Dans ce paysage, Covisint est nettement positionné comme pôle d'intégration pour l'automobile. Covisint existe en tant qu'entreprise depuis décembre 2000 et compte déjà 350 personnes aux États Unis et 60 personnes en Europe. Son siège social européen sera précisé en mai 2001. Les membres fondateurs réunissent de puissants constructeurs : Daimler Chrysler, Ford Motor Company, GM, Renault et Nissan. D'après Marc Siellet, Head of Business Development and Administration, Covisint, contrairement à ses principaux concurrents, se positionne au delà des achats et offre des services qui permettront à ses clients de rationaliser leur supply chain et de faire de l'ingénierie collaborative, ou du co-design.

 

Pour les constructeurs le e-business est source d'avantages compétitifs.

Laurent Bourrelier, Directeur du Projet B to B de Renault, a insisté sur le fait que le e-business est avant tout un facilitateur. Il n'y aura pas de modification de fond sur les rôles des constructeurs et des équipementiers. Le B to B est une évolution, pas une révolution. C'est cependant une source d'avantages compétitifs que Renault ne renie pas, bien au contraire.

S'il on prend par exemple le cas des enchères inversées : elles doivent permettre de faire des économies, mais pas de réduire les coûts. Il s'agit d'acheter mieux là où l'on n'achetait pas bien. Le champs d'application est très important au niveau des achats hors-production. En témoigne l'annonce récente de création d'une platte-forme d'achats commune à Renault et Nissan. Ceci étant encore à l'état de projet, nous n'avons pas pu en savoir plus.

Pour Laurent Bourrelier, la principale valeur ajoutée du e-business se situe dans le développement de la coopération entre constructeurs et équipementiers. C'est ainsi que des équipementiers sont venus le voir pour lui proposer des solutions d'amélioration du workflow dans le cadres d'espaces de travail virtuels. Les équipementiers sont aussi moteurs de projets e-business qui peuvent leur faire économiser beaucoup d'argent. A la question de savoir si les projets e-business des constructeurs ne cachaient la volonté de contourner les équipementiers de rang 1 en traitant directement avec les rangs 2 et 3, Laurent Bourrelier a répondu clairement : Renault ne sera jamais " Big Brother ". Il est illusoire de penser qu'il pourra un jour tout contrôler. Renault considère qu'il faut responsabiliser l'équipementier sur sa production complète. " Il faut s'assurer qu'il fait bien son travail plutôt que de le faire à sa place ". Renault, l'un des membres fondateurs de Covisint, va quoi qu'il en soit s'appuyer sur cette platte-forme pour déployer sa stratégie e-business.

 

PSA, jusqu'à maintenant plutôt économe en matière d'annonces sur sa stratégie e-business, nous a ici dévoilé un grand pan de ses ambitions. Vincent Carré, Directeur Stratégie e-business, a été clair sur les objectifs de PSA : d'ici à 2004, 25 nouvelles voitures devront être lancées. PSA ambitionne pour cela de diminuer le schéma de développement d'une voiture de 3 à 2 ans. Cet objectif ne pourra être atteint qu'en accélérant l'intégration avec les fournisseurs. Si PSA étudie actuellement ses participations à une ou plusieurs Market Places, son implication dans le e-business est clairement déterminée : " PSA Peugeot Citroën a la volonté d'intégrer l'ensemble des leviers disponibles à travers internet à ses processus fondamentaux. Toute opportunité " e " est un nouveau facteur pour asseoir la stratégie du groupe et servir son ambition qui est de construire et de vendre des véhicules des services qui satisfassent le client ". PSA travaille donc à la mise en œuvre dès 2001 d'une platte-forme d'échanges privée, point d'entrée unique sur internet destiné à optimiser les processus de travail qui lient PSA à ses fournisseurs. PSA ne réinventera pas ce qui existe déjà, mais mettra l'accent sur des services ou des applications jugées stratégiques ou non disponibles sur le marché, dans les domaines de l'innovation, du co-design, des achats et de la supply chain.

 

Des expériences concluantes ont été menées sur les achats en ligne, les enchères et les appels d'offres pour des achats hors production. Tout cela a été suivi d'un accompagnement des fournisseurs pour les aider à revoir les processus d'achats. La première illustration de l'implication de PSA dans des solutions e-business porte sur la co-conception. Ce service sera le premier opérationnel. La teneur de ce portail de co-design sera dévoilée courant avril 2001. Le principal objectif est de créer un plateau virtuel qui permette de partager à distance des données en 3 D ainsi que des standards de conception avec ses fournisseurs. Depuis mars 2001, ils ont mis en œuvre avec 4 fournisseurs pilotes la formation en temps réel de la maquette numérique. Dès 2002, les fournisseurs viendront directement réinjecter des définitions dans la maquette numérique avec un mécanisme d'autorisation garantissant une parfaite indépendance avec PSA. Ils seront alors acteurs de la mise à jour directe de la maquette numérique.

 

Et les hommes dans tout ça ?

L'impact du e-business sur l'industrie automobile devrait être colossal. Dans un cycle de vie internet, un an de l'ancienne économie équivaut à 12 semaines de la Nouvelle économie. L'échelle de temps n'est plus la même. C'est dans ce contexte de cycle de vie réduit que les constructeurs ambitionnent de réduire le cycle de conception d'une voiture de 42 à 18 mois. Mais comment intégrer les nouvelles technologies dans la chaîne de conception automobile ? Jusqu'où aller dans l'automatisation des processus ?

Comment répondre aux hommes qui jalonnent et constituent cette chaîne de conception lorsqu'ils argueront : " On a plus le temps d'apprendre ! " ?

Comment simplifier le processus d'apprentissage pour répondre à ces nouvelles exigences de rapidité dictées par un marché de plus en plus compétitif ?

 

Ce sera sans aucun doute le prochain défi du e-business qui a été jusqu'à maintenant quelque peu éludé.

 

Michèle Rochotte

 

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